L'ETUDE DE LA LANGUE
Donc, ça y est ! Les enfants écrivent, la production de textes libres est lancée dans la classe. Au bout d’un certain temps, il est possible d’y relier un travail d’étude de la langue. Quel « certain temps » ? …le temps qu’il faut pour que les enfants se soient authentiquement appropriés le texte comme moyen d’expression. Il paraît en effet nécessaire dans un premier temps, de « bannir tout ce qui pourrait parasiter l’expression » (dixit Marcel Thorel). Personnellement, quand j’ai lancé l’écriture de textes libres dans mon CM1, et sachant que cette activité était nouvelle pour les enfants, je n’ai commencé l’étude de la langue à proprement parler qu’après les vacances de Toussaint : je corrigeais les premiers jets moi-même, et le seul travail consécutif exigé consistait en une recopie soignée.
Cette « étude de la langue » a pour objectifs principaux (je laisse de côté l’approfondissement de l’expression, traité dans la partie précédente) :
- l’amélioration de la correction orthographique,
- l’amélioration de la précision dans l’expression (travail sur le vocabulaire),
- l’acquisition des quelques notions théoriques que nous pensons indispensables pour parler de la langue comme objet d’analyse et pour résoudre les problèmes d’accords, soit, à mon avis : déterminant/nom/adjectif et accords dans le GN ; verbe et GN ou pronom-sujet, accord S/V et quelques conjugaisons ; COD et pronominalisation (uniquement dans l’optique de l’accord du participe-passé).
Comment concevoir l’apprentissage de l’orthographe ?
Il y a un parallèle évident (?) à établir entre la manière dont on considère la lecture et la façon d'aborder l'apprentissage de l'orthographe. Si l'on pense qu'un enfant doit apprendre à déchiffrer pour savoir lire, on ne le croit pas capable d'appréhender directement l'orthographe. On l'invite donc à écrire du "bruit" en assemblant des syllabes, en pensant que la correspondance graphie/phonie pourrait servir de base à l'écriture, au lieu de construire du sens. Par la suite, cette illusion conduit à toute une collection de confusions entre des mots qu'on ne devrait normalement pas confondre, parce qu'ils n'ont pas le même sens ni la même place dans la phrase... d'où la nécessité des règles et de leurs inséparables exceptions. De plus, les rapprochements qui sont opérés pour "ne pas confondre" sont eux mêmes à l'origine de confusions (voir les fameux homophones grammaticaux !).
Si l'on pense au contraire que l'apprentissage de la lecture n'a pas immédiatement besoin des sons, on amène l'enfant à "deviner" (et donc à faire du sens) en s'appuyant sur des mots connus, en attendant qu'il en vienne "naturellement" à détecter puis à recenser et à assimiler, puis à savoir combiner, des unités constitutives plus petites que des mots (et pas tout de suite des syllabes !). Dans cet ordre d'idées, on peut penser qu'il est possible de démarrer en orthographe en observant la langue écrite dans sa complexité, en s'apercevant qu'on peut souvent écrire en se référant à des "C'est comme..." et qu'il existe des marques porteuses de sens, amorce d'une "grammaire intuitive". Dans cette optique, l'orthographe ne se construit pas plus que la lecture sur la correspondance graphie/phonie, et on ne peut pas se servir de liens supposés logiques entre l'oralisation d'un mot et la façon dont il s'écrit (sauf dans la petite minorité largement mise à contribution des pipe, papa, lolo, camarade, macaroni, etc...).
Si cela semble admis en lecture (bien qu'une approche basée massivement sur la combinatoire reste largement majoritaire), le domaine de l'orthographe apparaît très décalé et "rétrograde". Personnellement, c'est surtout faute de savoir "faire autrement" que je n'ai pu, pendant longtemps, que constater le mauvais rendement de ma pratique "traditionnelle", malgré des améliorations successives dans le sens de l'individualisation. Il arrive un stade où le "progrès" devient insuffisant, et où c'est une véritable "rupture" qui s'avère nécessaire. Le constat d'échec concernait l'absence d'un transfert tout juste satisfaisant des connaissances théoriques vers des situations réelles d'écriture et le très défavorable rapport "quantité de travail/efficacité" des règles d'orthographe de « style » BLED ou O.R.T.H.
J'ai trouvé un article de Jean-François Inisan, dans "Le Nouvel Educateur" n° 51 de Septembre 1993, qui dresse par le menu l'échec des règles traditionnelles, en complète cohérence avec ce que j'ai pu observer d'innombrables fois (mais j'assume pleinement la possibilité d'avoir été un très mauvais instituteur dans la manière de transmettre lesdites règles !). La base de l'article est cette interrogation : l'erreur provient-elle d'une méconnaissance de la règle, ou y a-t-il un raisonnement, logique mais erroné, qui a conduit à cette erreur ? La réponse est qu'il y a le plus souvent une justification erronée, résultat d'un raisonnement personnel, plutôt qu'une absence de raisonnement ou une paresse intellectuelle.
D'où par exemple : un effet de généralisation : (cauchemard, à cause de la règle des noms en -ard.) ; des résistances sémantiques (de l'eaux, parce que ça fait beaucoup de gouttes.) ; des règles mal comprises (un hiboux, parce que les noms en -ou prennent toujours un x.) ; des règles généralisées (polit, parce qu'on peut dire la politesse) ; des exceptions qui deviennent des règles générales (la tiédeure, parce que tous les noms en -eur s'écrivent -e.u.r.e.) ; des règles inversées (je vais a la maison, parce qu'on écrit a sans accent quand on ne peut pas dire avait) ; des règles fausses (J'ai manger, parce que quand deux verbes se suivent, le deuxième est à l'infinitif) ; des télescopages de situations où un choix difficile s'impose (Je les mangent) ; etc...
Mais alors, comment faire ? Que dit Freinet ? Pour lui, "La langue s'apprend par tâtonnement expérimental" ("Oeuvres pédagogiques", Ed. du Seuil, tome 2, page 359). L'étude des règles et l'étude de l'orthographe sont deux choses distinctes qu'il s'avère dangereux de confondre. Pour preuve, il avance l'idée couramment vérifiable que les enfants qui connaissent sur le bout des doigts toutes leurs règles mais qui ont une orthographe déplorable sont légions...
Reprenant son idée selon laquelle l'archétype de la méthode naturelle est l'apprentissage du langage chez le jeune enfant, il écrit :
"N'en déplaise à tous les spécialistes, théoriciens et praticiens, l'écriture, comme le langage, n'est pas une mécanique qu'on monte systématiquement. Elle est une portion de vie. Les mots y prennent d'abord leur figure non d'après l'étymologie ou les règles forgées arbitrairement par les pédagogues, mais d'après leur emploi dans la phrase, leur sens pour ainsi dire dialectique, leurs résonances réciproques, les liaisons qui s'établissent entre les éléments de pensée et d'action. C'est parce que, dans l'apprentissage du langage, les mots sont toujours chargés de pensée et de vie et que les mécanismes ne fonctionnent jamais à vide, que la réussite est si totale, sans aucun des drames qui accompagnent à l'école la langue écrite. Or, l'orthographe, c'est comme l'habit des mots. La contexture, les particularités de ces mots s'inscrivent dans notre esprit et dans notre comportement non point par logique et mémoire, mais par des voies exclusivement sensibles, par des photographies successives dont la netteté indélébile est seulement fonction de la sensibilité des organes qui les enregistrent, de l'éclairage particulier que nous projetons sur les éléments à inscrire sur la plaque sensible. On s'obstine à enseigner aux enfants les caractéristiques des mots comme on leur apprendrait à reconnaître les personnes familières par le simple détail des habits dont on les affuble : veste noire, pantalon gris et cravate à pois. Or, ce n'est jamais par ces seuls détails que l'enfant reconnaît un individu, ou bien il risquerait de graves méprises, confondant culottes et vestes, ou cravate et chapeau et les plaçant indifféremment sur les individus à distinguer. Non, le mécanisme de la connaissance ne fonctionne jamais ainsi, de cette façon simpliste. Il est beaucoup plus complexe, beaucoup plus sensible, mais aussi d'une tout autre sûreté. L'enfant voit venir une ombre et, sans seulement s'attarder à identifier pantalon ou cravate, il dit avec certitude: "Voilà mon papa !" Il n'a ni analysé ni répété ; il n'a même pas prêté attention, au sens où l'entend l'école : un coup d'oeil rapide a suffi. Il est sûr et définitif. C'est une telle erreur, dans la conception des mécanismes de fonctionnement dans l'écriture et la lecture, qui suscite cette mystérieuse dyslexie, mal scolaire du siècle. Les mots que vous apprenez à vos enfants sont neutres; ils ne sont acceptés que par la mémoire ou l'intelligence superficielle et, de ce fait, ne touchent pas les individus dans leurs fonctions vitales. Alors, on les habille au hasard, confondant culottes et cravates. Cela a si peu d'importance ! Mais l'habitude sera prise. Vous ne rétablirez plus les circuits normaux. (...) C'est vraiment en forgeant qu'on devient forgeron, c'est en parlant qu'on apprend à parler, c'est en écrivant qu'on apprend à écrire. Il n'y a pas d'autre règle souveraine, et qui ne s'y conforme pas commet une erreur aux conséquences incalculables."
Il condamne donc toutes les techniques scolastiques qui "tuent la vie", les exercices systématiques, la mémoire, le "par coeur" et le "travail de robot" sous-tendus par l'idée que l'apprentissage se fait par répétition et conditionnement. Il invite au contraire à "partir des tendances naturelles à l'action, à la création, à l'amour du beau, au besoin de s'exprimer et de s'extérioriser", justifiant ainsi une étude de la langue écrite basée sur la pratique du texte libre...
Techniquement, le tâtonnement expérimental rapporté à l'étude de la langue induit a priori trois axes de travail : l'imprégnation, le recours aux analogies et la construction de "lois" à partir d'accumulations de "faits de langue" (ce dernier point conformément à la démarche d'appropriation des concepts décrite par Britt Mary Bart dans "L'apprentissage de l'abstraction", Ed. Retz), et ce tâtonnement élargi à l'ensemble d'une classe en situation de coopération amène à concevoir une "méthode naturelle" d'apprentissage de l'orthographe, de la grammaire et de la conjugaison.
L'imprégnation. Paul Le Bohec, dans "Rémi à la conquête du langage écrit" (Editions Odilon), relate son expérience en CP-CE1 et plaide en faveur d'un apprentissage de l'écriture qui serait exclusivement basé sur l'imprégnation. Tout se construit sur la base d'un excellent climat de classe propice à l'expression (qui doit rester le souci premier), climat auquel contribue la relative décontraction du maître vis à vis de l'orthographe et l'absence consécutive de toute pression. Il s'agit avant tout de permettre l'accès à une "jouissance de l'écriture". C'est sur sa propre production d'écrits que l'enfant a le plus à apprendre. Le travail consiste donc en un texte quotidien corrigé et soigneusement recopié. La grande fréquence de la production implique deux "familles" de textes : de vrais textes d'expression, lorsqu'il y a vraiment quelque chose à dire ; des "phrases-types", lorsqu'il n'y a rien à dire, dans lesquelles ne s'exprime qu'une répétition gratifiante (plaisir de l'autonomie et du texte peu fautif), mais qui sont importantes pour la fixation orthographique. C'est d'ailleurs la répétition (mais pas la répétition gratuite !) qui détermine la progression : "La construction laborieuse de sa pensée permet à l'enfant de reprendre les mêmes thèmes, de raconter les mêmes histoires de son milieu de vie, à l'horizon encore restreint. Ce qui lui donne l'occasion de retrouver les mêmes mots qu'il finit à la longue par assimiler." Se mettent en place simultanément des "lois" provisoires (des séquences d'accords par exemple, comme « Les –s », « Les -s –nt », etc...), une sorte de grammaire intuitive.
Cette conception se retrouve par exemple dans la notice "Présentation et recommandations d'emploi" qui accompagne les fichiers d'orthographe édités par les PEMF. Le point y est fait sur la démarche globale d'étude de l'orthographe dans laquelle un tel outil peut prendre place, en différenciant ce qui relève de l'imprégnation "pure" (mais dans le sens d'un apprentissage plus systématique que celui préconisé par Paul Le Bohec) de ce qui peut découler d'un recours aux analogies. On peut y lire :
"Pour ce qu'on peut appeler l'orthographe lexicale, il n'y a aucun autre moyen que d'apprendre - une par une - les graphies de chacun des mots simples ("simple" étant pris ici non pas dans le sens qu'on lui attribue généralement au CP, c'est-à-dire "qui s'écrit comme il se prononce", comme : caravane, opératoire ou détourné, mais dans le sens de "qui n'apporte qu'une unité de sens", comme : lourd, pays, chiffre, photo...).
Cet apprentissage sera d'ailleurs grandement facilité par le fait que ces mots ne seront pas acquis isolément, mais inclus dans des membres de phrases, des structures qui aident à les reconnaître. De même qu'il est bien plus facile d'apprendre à lire : "J'ai joué au ballon avec Pascal" que "ai" ou "au", il est plus facile d'acquérir l'orthographe de "J'ai joué", que de "ai".
Il n'y a au niveau de nos élèves - et à celui de tous ceux qui n'ont pas étudié le latin - aucune raison pour que le mot "et" s'écrive "e - t". Après tout, on le comprend aussi bien écrit "&", de même qu'on comprend aussi bien "monsieur" écrit "M.", "et coetera" écrit "etc...", ou bien "vingt-cinq" écrit "25". L'écriture correcte de "et" ne pourra donc venir que d'une bonne connaissance visuelle de ce mot (et non d'une identification à un son [e] qui n'a aucun sens en lui-même). De même qu'à la lecture, la vision de ces deux lettres ne doit pas correspondre d'abord à un son, mais être reconnue comme signe écrit apportant une idée de "conjonction".
La seule façon d'aider un élève à acquérir la graphie d'un mot comme "et", c'est de lui permettre de bien connaître la (ou les) structure(s) dans laquelle ce mot s'emploie - en associant éventuellement d'autres mots qui, jouant un rôle voisin, se retrouve dans la même structure ("ou" par exemple). D'où, si l'on veut systématiser et aider l'acquisition, des exercices où l'on travaillera la structure dans laquelle figure ce mot, et la mémorisation de phrases-références."
Le recours à des analogies. La même notice poursuit : "Mais heureusement, bien plus nombreux sont les mots composés d'unités orthographiques correspondant à des unités de sens. Et ces unités peuvent se retrouver, par analogie, dans d'autres mots déjà connus.
C'est le cas de tout ce qu'il est convenu d'appeler (mal !) l'orthographe grammaticale :
- le "x" de neveux, choux...
- le "nt" de font, enlèvent, marcheraient...
- le "ez" de venez, avancez, allez...
Mais c'est aussi le cas, par exemple :
- du "s" initial dans les mots sa (chienne), ses (amis), le sien...
- du "tion" d'opération, ou d'élévation...
- du "es" final de tes (yeux), les (arbres), des (mots), ces (livres)...
- des radicaux de tous les mots composés...
- des suffixes et des préfixes...
On pourra presque toujours déduire l'orthographe d'un mot (unité de sens par unité de sens) par la méthode de la "4ème proportionnelle", et ce sans avoir besoin de connaissances grammaticales particulières, et sans recours à aucune règle. (Etant bien entendu qu'il faut éviter d'isoler ce mot de la structure qui le contient.)
Connaissant : pour répondre => je répondrai
pour vendre => ....................
on déduira l'orthographe de "je vendrai".
De "moi et ma soeur", "moi et mon frère", "lui et sa soeur", on déduit : "lui et son frère". Ce qui permet d'employer, plus ou moins intuitivement, à l'oral comme à l'écrit, des formes encore jamais utilisées. [...]
Aussi, à un élève qui hésite pour écrire "dans mes textes", au lieu de lui faire tirer à pile ou face entre "m'est", "mais", "mes", "met", "mets"... :
- montrer qu'il sait écrire : "dans mon texte" (ou peut-être d'abord "avec mon papa", mieux connu) ;
- puis qu'il sait écrire : "dans tes textes" ;
- donc qu'il peut écrire : "dans mes textes".
Intéressante à noter, si on essaie de pratiquer cette pédagogie de l'orthographe, l'évolution de la façon dont les élèves posent leurs questions. On passe alors de : - Comment ça s'écrit, "parlé" ?
question à laquelle on ne peut donner aucune réponse, à :
- Comment ça s'écrit, "je t'ai parlé" ? ...puis à :
- "Je t'ai parlé", ça s'écrit comme "J'ai parlé" ?
Si un certain nombre d'enfants voient très vite que "on a joué", c'est comme "on a chanté", que "je n'ai pas soif", ça doit s'écrire comme "j'ai soif", pour d'autres, c'est loin d'être évident. Et il va falloir les aider à reconnaître ces identités, ces analogies, qui permettront des graphies correctes."
Accumulation et découverte de "lois", exemple-type. Les progrès vont se trouver accélérés et facilités (?) si des régularités, des « lois », peuvent être mises en lumière. Il ne s’agit absolument pas de « règles », mais de constatations provisoires et révisables à la suite d’observations ultérieures. La manière la plus simple et la plus évidente de distinguer ces régularités, et d’en tirer des enseignements, consiste à analyser une accumulation de « faits de langue » autour d’un même mot, d’une même tournure…
On pourra ensuite se référer à ces « lois », ou plus simplement à un seul exemple-type connu de tous. L’exemple-type est intéressant puisqu’il participe d’un ancrage affectif dans le « patrimoine de classe ». « C’est comme… » est bien la formule magique de toute méthode naturelle !
Il paraît ici très éclairant de se référer aux travaux de Britt-Mari Barth, dans « L’apprentissage de l’abstraction » (RETZ-Pédagogie, 1987). Sans aller jusqu’à entreprendre un résumé de ce livre si riche et complexe, j’y relève simplement quelques phrases, quelques idées qui me semblent sous-jacentes à la démarche ici décrite : « Qu’apprend-on quand on apprend un concept ? Boring, cité par Bruner, s’exprime ainsi : Une pierre est une forme, une couleur, un poids et une substance, le tout dans une relation compliquée. Boring appelle ces qualités des attributs et Bruner adopte cette dénomination. Apprendre serait donc d’abord la capacité de discerner des attributs, de sélectionner ce qu’on retient. […] Quand on apprend un concept on apprend ainsi à reconnaître et à distinguer les attributs qui le spécifient. […] Pour pouvoir désigner cette combinaison d’attributs on la nomme par un mot qui est un symbole arbitraire, une étiquette. Cette étiquette nous permet de regrouper tous les exemples qui possèdent la même combinaison d’attributs dans la même catégorie, quelles que soient les différences par ailleurs. » (page 21) La « Structure opératoire d’un concept » est présentée sous forme d’un schéma simple à conserver en tête :
Dénomination une étiquette non pas isolée mais qui désigne une liste d’…
attributs laquelle est susceptible d’être appliquée _______________ à des … _______________ _______________ exemples _______________ _______________ |
Il faut voir aussi quelles sont les stratégies mises en œuvre pour conceptualiser (page 32), l’application aux situations d’enseignement (page72) et la schématisation d’un modèle cognitif général (page 101)…
Pour prendre un exemple très simple, tout ceci montre bien pourquoi une règle du genre « On écrit a sans accent quand on peut le remplacer par avait. On écrit à avec un accent dans les autres cas. » a toutes les chances d’être inefficace : le à n’est absolument pas considéré par rapport à ses attributs ! (Voir plus loin dans Recherches collectives, accumulations, « lois ».)
C’est dans cet ordre d’idées que se dessine une démarche générale d’apprentissage, théorisée en six étapes par Sylvain dans l’article « Vers une méthode naturelle d’étude de la langue » publiée dans le « Nouvel Educateur » n° 115 de Janvier 2000 :
En coopérant dans le groupe classe afin d’être copropriétaire d’un ensemble de matériaux qui vont aider chacun et tous dans de nouvelles productions/actions. PRODUIRE encore…
Il faut à un moment donné regarder « de plus près » ce que l’on a écrit, dégager des savoir-faire, comprendre comment tel ou tel effet a été bien « posé ». Alors viennent les tris, les classements, les accumulations d’exemples qui deviennent autant d’attributs de concepts qui se construisent. Cette phase est difficile car très corrélée à l’existence d’outils, de lieux de classement. On en arrive au « classeur de français ».
qui amènent une utilisation des outils de classement pour aboutir à l’étape suivante :
qui permettent au pouvoir sur la langue de naître.
Pratiquement…
Il reste à décrire la mise en œuvre de ces principes dans le travail au jour le jour… Ce qui suit concerne a priori davantage le cycle III, et s’articule en deux parties (outre quelques lignes consacrées au matériel puis au démarrage) : le travail personnel de correction puis d’imprégnation d’un enfant sur son texte, puis le travail collectif/coopératif autour d’un texte élu, par l’entrée « dictée coopérative » (mais il en existe d’autres, qui consisteraient par exemple à partir d’une statistiques des erreurs les plus fréquemment rencontrées dans les textes libres de la classe, ou d’une mise au point collective de textes… sans oublier le choix, tout aussi légitime, de ne pas faire porter l’étude de la langue sur des textes d’expression ; il serait intéressant que ces autres choix fassent à leur tour l’objet d’écrits, en complément de celui-ci).
Il est également important de conserver ceci en mémoire : tout ce qui suit est « technicité », « accélérateur de progrès », et rien de plus. Ce qui signifie que ce n’est pas « central », en termes de choix pédagogiques, rapporté à l’activité qui est à la base de tout, à savoir la PRODUCTION, mais qu’au moins tout cela revêt un SENS, et que la machine ne tourne pas à vide. Tout ce qui est fait sur et autour des textes ne doit être qu’au service de la conquête par chaque enfant au centre des apprentissages d’une maîtrise, d’un pouvoir toujours plus grand sur l’écrit re-situé dans le contexte global de l’EXPRESSION–CREATION. De plus, il me semble que c’est bien dans la production massive d’écrit que se réalise, et de loin, l’essentiel de l’apprentissage ; il faut donc re-préciser une fois encore que le texte libre n’est pas seul : les enfants écrivent aussi des lettres ; des résumés, des écrits de types variés pour les conférences en histoires, géographie, sciences, technologie ; des écrits correspondants à des « missions » pour la classe, comme les lettres collectives aux correspondants, des résumés d’actualité, etc… Et c’est sur l’ensemble de ces écrits que porte par exemple la « liste d’orthographe » décrite ci-dessous.
Matériel… Un mot, d’abord, sur le matériel personnel et collectif dont on dispose dans ma classe. L’ensemble du travail d’écriture et de français s’effectue sur trois cahiers : le CAHIER D’ECRIVAIN dont il a été question dans la première partie, le CAHIER DE MOTS, relié à la « liste d’orthographe », et le CAHIER DE FRANÇAIS (24 x 32, protège-cahier jaune). Celui-ci est partagé en deux parties, comme l’avait suggéré Sylvain Hannebique dans un article consacré aux outils (CH’TI QUI puis Nouvel Educateur) : partie réservée au travail collectif/coopératif côté recto (dictées coopératives, remarques, feuilles d’entraînement, fiches de lecture, dictées de contrôle) ; partie réservée au travail personnel côté verso (fiches d’orthographe, dictées à partir des listes, résumés de livres). Chaque enfant dispose en plus d’un porte-vues dans lequel sont rangés des outils, tels que, pour le français, des listes de mots et des tableaux de conjugaison. Je n’utilise pas de « classeur de français », car je pense qu’il n’est pas rentable de le mettre en route - tout au moins sous la forme de celui dont nous disposons actuellement, qui me semble trop complexe -, alors que je ne conserve les élèves qu’un an et qu’il ne sera plus utilisé par le collègue qui suivra en CM2. Cela m’amène à l’idée de l’ajout d’une troisième partie dans le cahier, qui serait justement consacrée au classement des « lois » trouvées… mais ça me semble matériellement difficile à réaliser !
Le matériel collectif est constitué par trois COLORTHOS, trois « J’écris tout seul », une dizaine de dictionnaires divers et les fichiers d’orthographe.
Le démarrage. Symboliquement, pour bien mettre en avant le fait que la production de textes sera vraiment « centrale » dans la classe, la première activité de l’année est la rédaction d’un texte… pas libre ! Pas libre dans la mesure où les enfants n’ont pas le choix du moment, libre quand même par le choix du thème, et c’est bien là ce qui peut leur poser problème.
Une fois inventorié et rangé le matériel individuel, c’est à dire au plus une demi-heure après l’entrée en classe, j’annonce donc que nous allons écrire notre premier texte, et mettre ainsi en route le CAHIER D’ECRIVAIN. Les directives de bases (écrire sur la page de droite, passer deux lignes pour permettre la correction…) sont données. La consigne est d’écrire un texte sur un sujet que l’on choisit soi-même. Pour les enfants de CM1 dont j’ai la charge, la grande nouveauté consiste à écrire ce qu’ils veulent. Dans l’école (très traditionnelle), la production d’écrits existe fortement, mais toujours dans un cadre très dirigé. Certains sont d’emblée à l’aise et heureux de cette nouvelle liberté ; d’autres en conçoivent surprise et angoisse. Par conséquent, avant de prendre le stylo, il y a une première discussion sur les thèmes : ceux qui ont une idée la partagent, ou en proposent quelques autres s’ils le peuvent. Quand chacun a trouvé une idée satisfaisante, on commence à écrire… Au bout de quelques minutes, j’arrête l’activité pour demander à celles et ceux qui seraient en difficulté pour continuer de le signaler ; les autres peuvent alors leur suggérer des pistes. Puis on continue…
Finalement, au bout d’un quart d’heure ou vingt minutes, tout le monde a terminé son texte. On consacre le reste du temps avant la récréation à l’illustrer. On apprend aussi immédiatement à consigner ce qui vient d’être réalisé sur le PLAN DE TRAVAIL.
Evidemment, le travail du maître est plutôt conséquent le premier soir ! Il faut corriger tous les textes d’un seul coup (ce qui ne se reproduira plus quand les décalages apparaîtront), et trouver pour chacun d’eux une « réponse » approprié.
Le lendemain, le travail consistera en la recopie du texte, le choix de coller ou non la « réponse » et l’illustration, et à commencer les présentations à la classe. Ce temps de recopie, puis éventuellement d’écriture d’un deuxième texte, est l’embryon de l’heure de travail personnel qui suivra toujours le « Quoi de neuf ? » pendant le reste de l’année (9 h – 10 h).
Durant la première quinzaine, je fais circuler dans les familles les albums de textes des années précédentes. C’est l’occasion pour les parents de prendre contact avec une technique qu’ils ne connaissent pas (et que j’explique avec soin lors de la réunion de début d’année). C’est l’occasion pour les enfants de mettre une réalité derrière les mots dans la liberté de pouvoir TOUT écrire. Ils choisissent un texte qu’ils liront à la classe, en expliquant le pourquoi de leur choix…
Le travail personnel sur le texte
Un enfant vient de terminer la rédaction du premier jet de son nouveau texte. Il a utilisé une page de droite de son cahier d’écrivain (directement, car la notion de brouillon n’existe pas dans la classe), celle de gauche étant réservée à des directives sur le travail consécutif, le collage de la réponse et de l’illustration éventuelle, en passant des lignes. Il s’est normalement aidé, au minimum, des listes de mots dont il dispose dans son porte-vues, mais peut-être aussi de son dictionnaire ou de l’un des « J’écris tout seul » disponibles. Il vient me voir au bureau. Je lis son texte, et s’il ne pose pas de problème de compréhension ou de cohérence interne, j’invite à le déposer dans le « bac à corriger ». Mais au fur et à mesure que l’année avance, je demande de plus en plus souvent à certains de retourner à leur place, de se relire soigneusement : « Je refuse de corriger ce texte : il y a beaucoup trop d’erreurs, tu es capable de mieux utiliser tout ce que tu sais ! » La résolution des problèmes de construction, de précision, de cohérence, etc… a été évoquée dans la première partie.
La mise en place du code de correction. Il s’agit de faire en sorte qu’à l’aide d’outils, l’enfant puisse en arriver à corriger progressivement par lui-même toutes les erreurs de son texte.
L’outil principal auquel je vais le renvoyer pour cela est le COLORTHO. Il s’agit d’un ensemble de fiches rangées dans un porte-vues, réparties à l’origine en six séries matérialisées par des couleurs de papier différentes :
- série rouge : mots outils et invariables, classés par ordre alphabétique,
- série jaune : les sons,
- série rose : homonymes, opposés deux par deux,
- série verte : orthographe d’usage,
- série bleue : les accords,
- série marron : les verbes.
Je n’utilise pas la série jaune, mais j’ai ajouté une septième série, orange, sorte de fourre-tout qui rassemble tout ce qui manque, à mon avis, dans les autres séries (voir plus loin les grilles de fiches). Mon projet actuel est d’enrichir cette nouvelle série par des listes de synonymes auxquelles se référer pour trouver les moyens d’éviter les répétitions les plus courantes sur faire, dire, mettre, etc…
Le COLORTHO ne contient aucune règle ni aucune explication. Il est exclusivement constitué d’exemples, grâce auxquels l’enfant va pouvoir se corriger en discernant des analogies.
Très concrètement, je souligne dans le texte les parties de mots fautives avec des feutres de couleurs correspondant aux fiches concernées du COLORTHO, et j’indique le numéro de la fiche à laquelle il va falloir se reporter. Pour les erreurs qui ne trouveront pas de solution de cette façon (essentiellement des fautes d’usage), j’entoure le mot, ce qui signifie que la correction devra s’effectuer à l’aide d’outils tels que le « J’écris tout seul » ou le dictionnaire. Je procède de la même manière pour certaines erreurs dans les terminaisons de verbes dont les conjugaisons ont été apprises : j’entoure, et j’indique le temps (P, IMP, PC, PS…), pour envoyer à la mémoire ou aux tableaux de conjugaison rangés dans le porte-vues. Un « truc » permet d’aller vite : le plan du COLORTHO est collé sur mon bureau… De toute façon, on finit par connaître par cœur les références des fiches auxquelles on renvoie le plus souvent… La mise en place de ce code de correction est donc très rapide (guère plus de trois ou quatre minutes pour un texte d’une page).
Les directives pour le travail personnel. Il s’agit d’indications qui vont permettre à l’enfant de mener seul son travail d’imprégnation, dans deux directions : l’apprentissage « par cœur » de mots, d’expressions ou de membres de phrases avec la « liste d’orthographe » dont il sera question plus loin, et l’intégration de situations, de structures, grâce aux fichiers d’orthographe des P.E.M.F. et des éditions ODILON.
Ce qui est à apprendre par cœur est transcrit sur la liste d’orthographe, et en haut de la page de gauche du CAHIER D’ECRIVAIN, je note « Fiches Ortho : » et le numéro d’une fiche d’orthographe. Je tiens par ailleurs un tableau par enfant comprenant la mise en relation des pages du COLORTHO et les références de toutes les fiches dont je dispose (voir les grilles erreurs/fiches plus loin). Je choisis en fonction des erreurs que j’ai détectées comme étant les plus fréquemment commises.
Quand l’enfant va récupérer son cahier, le lendemain matin, il y trouvera donc son texte prêt à être corrigé, une réponse (ou plusieurs, parmi lesquelles il fera son choix) et la référence d’une fiche d’orthographe. En revanche, sa liste d’orthographe ne lui sera rendue que lorsqu’il aura achevé son travail de correction…
Correction et « recopie » du texte. « Armé » d’un COLORTHO et d’un « J’écris tout seul », l’enfant, durant le temps de travail personnel, corrige son texte en écrivant au crayon de bois sur les lignes laissées libres. Il vient me montrer son résultat au bureau ; nous discutons éventuellement des erreurs mal corrigées ou des blocages rencontrés.
Au bout d’un certain temps, il est bien évident que la plupart des enfants en viennent à « sauter » au-dessus du COLORTHO : ils savent que « bleu 1 », par exemple, indique le manque d’un –s au pluriel d’un nom, et ils n’ont plus besoin de se référer à la fiche…
J’exige alors une « recopie » impeccable sur une feuille de classeur, qui est ensuite collée, par la marge, au dessus du premier jet, qui n’est donc plus visible qu’en soulevant la mise au propre, améliorant ainsi l’apparence globale du cahier, mais permettant de conserver la possibilité de se référer aux tâtonnements.
La « liste d’orthographe ». C’est une technique initiée par Jean Le Gal et reprise et explicitée par Michel Barrios (voir Le Nouvel Educateur n°115 de Janvier 2000), apparemment très utilisée. Selon ce dernier, cet outil répond à cinq idées très simples :
- personnalisation car l’orthographe est « intime » ;
- imprégnation d’un code qui n’est qu’une convention ;
- des séances courtes mais fréquentes ;
- orthographe « corporelle » passant par des automatismes de la main ;
- rapidité.
Chaque enfant dispose d’une grille sur ce modèle, sur laquelle sont reportés les mots, expressions ou fragments de phrases qu’il devra apprendre par cœur :
Il paraît préférable de ne pas travailler sur des mots isolés, mais plutôt sur des unités plus complexes qui vont induire une imprégnation de « grammaire intuitive », l’automatisation d’accords et la fixation des expressions couramment utilisées complètes.
Tous les matins, après le « Quoi de neuf ? », vers 9 h, le travail démarre par les rituelles « cinq minutes d’orthographe ». Les enfants prennent leur grille et leur « cahier de mots ». Au signal du « Maître de la parole » du jour, qui va mesurer très exactement cinq minutes à l’aide d’un minuteur de cuisine, tout le monde copie ses mots, cinq fois... Il rappelle régulièrement la consigne empruntée à Michel Barrios : « On lit le mot les yeux ouverts, puis les yeux fermés ; on écrit le mot les yeux ouverts, puis les yeux fermés. » (…façon de parler…) Les enfants disposent d’un « cache » en carton qui leur permet de dissimuler au fur et à mesure ce qu’ils copient et de faire fonctionner leur mémoire visuelle. Chaque nouveau mot appris est repéré par une croix dans le rond à gauche de la colonne. Une séance identique a lieu également à l’entrée en classe à 13 h 30.
Après chaque séquence de trois séances d’apprentissage, les enfants se mettent par deux et se dictent mutuellement les mots appris. Pour chaque mot « bon », une case est coloriée en vert à droite de la colonne. Les trois cases correspondent à trois dictées possibles : un mot « sort » de la liste s’il a été correctement écrit deux fois ; il est alors barré, et considéré comme acquis. Mais ce serait se leurrer que de croire que cet « acquis » est solide et définitif… C’est tout le problème de l’évaluation en orthographe : est-elle seulement possible ?
Le travail sur les fichiers d’orthographe. L’idée qui justifie l’utilisation des fichiers, c’est que ce travail va permettre la « mise en mouvement » des structures apprises par cœur sur les listes d’orthographe, pour induire un premier pas vers une généralisation…
Les indications portées en haut de la page de gauche du CAHIER D’ECRIVAIN permettent aux enfants de se reporter à une fiche d’orthographe qu’il va devoir travailler.
La fabrication des grilles ci-dessous a posé le problème de l’adéquation des fichiers et du COLORTHO. Il m’a fallu créer des fiches pour des rubriques du COLORTHO auxquelles ne correspondait aucun travail disponible, et inaugurer une boîte baptisée - modestement ! - G (« O3 » désigne les fiches 40 à 100 éditées par Odilon ; les B, C et V - formes verbales - sont ceux des PEMF). Il a fallu, inversement, ajouter des pages dans le COLORTHO pour que des travaux disponibles dans les fichiers ne se trouvent pas laissés de côté !
Série bleue : les accords |
|||||||||||||||||||||||
1 |
Singulier / pluriel des noms et des adjectifs |
B109 |
B118 |
B120 |
B143 |
B163 |
B174 |
B180 |
C202 |
C203 |
C204 |
||||||||||||
C205 |
C206 |
C207 |
C208 |
C209 |
C210 |
C211 |
|
|
|
||||||||||||||
2 |
Pluriel en -x, -eaux, -eux |
C201 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
||||||||||||
3 |
Pluriel en -aux, -al, -ail |
03.93 |
G26 |
|
|
|
|
|
|
|
|
||||||||||||
4 |
Plusieurs noms |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
||||||||||||
5 |
Masculin / féminin en –e |
B111 |
B112 |
B134 |
B148 |
C267 |
C268 |
C269 |
|
|
|
||||||||||||
6 |
Masculin / féminin en -ère, -ière |
03.80 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
||||||||||||
7 |
-eux / -euse |
03.71 |
|
|
|
-euse |
03.82 |
|
|
|
|
||||||||||||
8 |
-eur / -euse |
03.66 |
|
|
|
-eur |
03.49 |
|
|
|
|
||||||||||||
9 |
Double consonne au féminin |
G27 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
||||||||||||
10 |
Féminin en –esse |
G28 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
||||||||||||
11 |
-teur / -trice |
G29 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
||||||||||||
12 |
Accord des adjectifs |
C272 |
C273 |
C274 |
C275 |
C276 |
C277 |
C278 |
C279 |
C280 |
C281 |
||||||||||||
13 |
Accord du PP compl. placé avant… |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
||||||||||||
14 |
Il / ils / elle / elles |
B166 |
B194 |
C234 |
C235 |
C236 |
C237 |
C238 |
C239 |
|
|
||||||||||||
15 |
Tout / toute / tous / toutes |
G24 |
B160 |
C291 |
C292 |
C293 |
-t/-s |
B130 |
G22 |
-e/-es |
G23 |
||||||||||||
16 |
Chaque |
G30 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
||||||||||||
17 |
Quel / quelle / quels / quelles |
C294 |
C295 |
C296 |
|
|
|
|
|
|
|
||||||||||||
18 |
Celui / ceux / celle / celles |
G31 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
||||||||||||
|
|||||||||||||||||||||||
|
Série verte : usage |
||||||||||||||||||||||
|
1 |
S=Z entre deux voyelles |
03.97 |
G35 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|||||||||||
|
2 |
SS=S entre deux voyelles |
03.97 |
G36 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|||||||||||
|
8 |
M devant m, b, p |
G19 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|||||||||||
|
9 |
Noms féminins en –e |
B173 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|||||||||||
|
10 |
Noms féminins en –eur, -té |
-eur |
G20 |
|
|
|
-ée/té |
G21 |
|
|
|
|||||||||||
|
11 |
Lettre finale par déduction |
B131 |
B138 |
B150 |
B161 |
B170 |
C282 |
C283 |
C284 |
C285 |
C286 |
|||||||||||
|
12 |
Noms masculins en –ier, -er |
03.59 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|||||||||||
|
13 |
Noms / adjectifs numéraux |
A81 |
|
|
|
|
|
|
|
|
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|||||||||||
|
14 |
Adverbes en –ment |
A82 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|||||||||||
|
18 |
Apostrophes des noms : l’ d’ |
B123 |
C240 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|||||||||||
|
19 |
Apostrophes des verbes : j’ n’ d’ |
J’ |
G 32 |
|
n’ |
G33 |
|
d’ |
G34 |
|
|
|||||||||||
|
20 |
Apostrophes des pronoms : l’ m’ t’ s’ qu’ |
B168 |
B175 |
B197 |
C241 |
C242 |
C243 |
C244 |
C245 |
C246 |
C247 |
|||||||||||
|
21-22-23 |
Adjectifs possessifs |
B101 |
B108 |
B125 |
C212 |
C213 |
C214 |
C215 |
C217 |
C218 |
C219 |
|||||||||||
|
24 |
Adjectifs démonstratifs |
B142 |
B171 |
C258 |
C259 |
C260 |
C261 |
C262 |
C263 |
C264 |
C266 |
|||||||||||
Série verte : usage |
||||||||||||
1 |
S=Z entre deux voyelles |
03.97 |
G35 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
2 |
SS=S entre deux voyelles |
03.97 |
G36 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
8 |
M devant m, b, p |
G19 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
9 |
Noms féminins en –e |
B173 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
10 |
Noms féminins en –eur, -té |
-eur |
G20 |
|
|
|
-ée/té |
G21 |
|
|
|
|
11 |
Lettre finale par déduction |
B131 |
B138 |
B150 |
B161 |
B170 |
C282 |
C283 |
C284 |
C285 |
C286 |
|
12 |
Noms masculins en –ier, -er |
03.59 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
13 |
Noms / adjectifs numéraux |
A81 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
14 |
Adverbes en –ment |
A82 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
18 |
Apostrophes des noms : l’ d’ |
B123 |
C240 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
19 |
Apostrophes des verbes : j’ n’ d’ |
J’ |
G 32 |
|
n’ |
G33 |
|
d’ |
G34 |
|
|
|
20 |
Apostrophes des pronoms : l’ m’ t’ s’ qu’ |
B168 |
B175 |
B197 |
C241 |
C242 |
C243 |
C244 |
C245 |
C246 |
C247 |
|
21-22-23 |
Adjectifs possessifs |
B101 |
B108 |
B125 |
C212 |
C213 |
C214 |
C215 |
C217 |
C218 |
C219 |
|
24 |
Adjectifs démonstratifs |
B142 |
B171 |
C258 |
C259 |
C260 |
C261 |
C262 |
C263 |
C264 |
C266 |
|
Série orange |
||||||||||||
1 |
On |
B116 |
B146 |
C248 |
C249 |
C250 |
C251 |
V350 |
V351 |
V352 |
V353 |
|
2 |
Et |
B104 |
B139 |
C221 |
C222 |
C223 |
C229 |
|
|
|
|
|
3 |
à |
A. …à quelqu’un… |
G13 |
C253 |
C254 |
|
|
|
|
|
|
|
B. Quelque part |
B114 |
B157 |
B159 |
C253 |
C254 |
C255 |
|
|
|
|
||
C. à = avec |
G15 |
C252 |
C257 |
|
|
|
|
|
|
|
||
D. à = pour |
G16 |
C252 |
|
|
|
|
|
|
|
|
||
C. Quand ? |
B159 |
C253 |
|
|
|
|
|
|
|
|
||
4 |
Ou |
B102 |
C224 |
C225 |
C226 |
C229 |
|
|
|
|
|
|
5 |
Où |
G25 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
6 |
ça |
B107 |
C230 |
C231 |
|
|
|
|
|
|
|
|
7 |
Majuscules |
B103 |
B115 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
8 |
Mais |
B112 |
B126 |
C227 |
C228 |
C229 |
|
|
|
|
|
|
9 |
Est-ce que / qu’ |
B105 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
10 |
Parce que / qu’ |
B133 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
11 |
Noms propres |
B135 |
B164 |
B192 |
|
|
|
|
|
|
|
|
12 |
? Ponctuation , ! |
B196 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
13 |
B178 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
||
14 |
B186 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
||
15 |
Ponctuation du dialogue |
B144 |
B152 |
B196 |
|
|
|
|
|
|
|
Le travail est effectué sur le cahier de français, du côté « travail personnel » (à l’envers). Chaque fiche achevée et auto-corrigée est matérialisée par une case coloriée sur le plan de travail.
Il m’arrive également, lorsque les erreurs commises ne trouvent pas d’écho satisfaisant dans les fiches dont je dispose, de transcrire directement dans le cahier d’écrivain un exercice créé pour l’occasion…
Ce travail personnel peut paraître lourd. Il l’est sans doute… Je me suis demandé s’il ne pourrait pas en venir à bloquer l’expression, à faire renoncer à l’écriture. Il n’en est rien : cela montre, au fond, que rien ne peut plus détourner l’enfant de son besoin d’expression lorsqu’il a été suffisamment enraciné au plus profond.
Suivi du travail personnel. Outre la grille qui me permet de savoir où en sont les enfants par rapport aux fichiers d’orthographe, je dispose d’un tableau général, tel qu’il est, je crois, utilisé dans beaucoup de classes, sur lequel je note tout ce qui a été réalisé par chacun sur la durée d’un plan de travail (quinze jours) :
Plan de travail n° du au |
Textes libres |
Lettres |
Ortho. |
Lecture |
Brevets |
etc... | |||||
Ecrire |
Corr. |
Rec. |
Ecrire |
Rec |
Fiches |
Fiche |
livre |
Français |
Maths |
||
Alessandro |
|
|
|
|
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|
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|
Alexandra |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Allison |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Audrey |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Benjamin |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Charles |
|
|
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|
|
|
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|
|
|
|
Claire |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Estelle |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Fanny |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Flavien |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Gwendoline |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
etc... |
Le travail collectif/coopératif :
Il est organisé à la semaine, du lundi au vendredi, à partir d’un texte d’enfant qui a été élu par la classe.
Il est conçu comme une sorte d’« arrêt sur image » qui contrairement au travail personnel, continu et entièrement fondé sur l’imprégnation et l’automatisme, va permettre de prendre le temps de la réflexion sur les mécanismes de la langue, en prenant un certain recul, en se détachant de la production immédiate, mais sans pour autant se trouver complètement « décontextualisé ». Je m’interroge souvent sur la part respective de ces deux approches dans les progrès des enfants. Je pense, intuitivement, que la part prépondérante revient au travail personnel, et le collectif revêt parfois à mes yeux, sur certains points (notamment en grammaire et en conjugaison !), l’aspect d’une « concession à l’institution ». C’est pourquoi au fil du temps, j’ai beaucoup réduit quantitativement son importance, en resserrant sur ce qui me paraît vraiment nécessaire à l’augmentation d’un pouvoir sur l’expression future, en faisant en sorte que pour les enfants, tout travail d’étude de la langue soit bien relié à la perspective d’écrire de meilleurs textes (c’est d’ailleurs pour moi, actuellement, un tendance générale qui va en s’amplifiant : simplifier, aller vers la plus grande économie de moyens, pour gagner du temps, et pour que les choses paraissent simples et faciles, avec toujours le souci essentiel du SENS). Mais dans l’absence de réponse fiable à la question des « parts respectives », je continue de jouer sur les deux tableaux, avec l’idée d’une complémentarité, d’un « éclairage » réciproque.
Après avoir testé plusieurs modes d’élection, j’ai adopté cette formule qui donne satisfaction à tous et permet de conserver de la sérénité : les enfants ont chacun leur semaine, par ordre alphabétique ; quand vient leur tour, ils proposent à leurs camarades plusieurs textes parmi leurs derniers écrits ; ces textes sont relus, même s’ils sont connus, puisque déjà présentés ; et on vote ! Ainsi, il n’y a pas la rancœur d’avoir à attendre avec angoisse l’élection - enfin ! - de son texte, ni de propension à écrire pour « épater le galerie ».
Le travail démarre toujours le lundi par la dictée coopérative, et se termine toujours le vendredi par la dictée de contrôle. Entre temps, le seul travail immuable est la « fiche d’entraînement » construite à partir des remarques formulées lors de la dictée coopérative. Le travail sur le vocabulaire, la recherche d’une nouvelle « loi » à partir d’une accumulation n’ont pas lieu systématiquement chaque semaine, et sont subordonnés aux besoins repérés.
La dictée coopérative. Elle a lieu le lundi matin après la récréation, du côté « travail coopératif » du cahier de français (à l’endroit). Je dicte ; la consigne pour les enfants est d’interrompre la dictée à chaque blocage ou même à chaque doute en levant la main. Ceux qui savent répondre à la question posée lèvent à leur tour la main ; je leur donne la parole et ils interviennent, soit en épelant tout simplement le mot demandé, soit, et c’est l’attitude que j’encourage, en faisant référence à une analogie (« C’est comme… ») ou à l’une des « lois » déjà trouvées… Le but est évidemment que chacun parvienne à ne faire aucune erreur, mais également de toujours revenir sur ce qui est théoriquement déjà connu.
En réalité, il n’en va pas ainsi, car les enfants n’ont pas d’emblée une estimation juste de ce qu’ils savent ou ne savent pas : ce qu’ils croient savoir interfère fortement chez certains. On peut s’en apercevoir de manière plus évidente encore dans un autre type d’exercice où l’on va dicter sans recours possible à la coopération, en demandant par exemple de souligner d’une couleur tout ce dont on est absolument certain et d’une autre couleur tout ce dont on n’est pas complètement sûr. Au total, il reste souvent des erreurs dans les dictées coopératives…
De mon côté, pendant la dictée, j’ai noté les points qui posaient problème, avec une idée de statistique de manière à déterminer ce que seront les « remarques » les plus importantes à formuler.
Le texte de la dictée est ensuite transcrit par des enfants au tableau, ce qui donne l’occasion de revenir sur quelques difficultés. Une fois la correction achevée, je demande sur quels points ont porté les erreurs qui persistaient, afin de compléter ma « statistique ».
Les « remarques » sur le texte de la dictée. Dans la foulée, on analyse rapidement le texte, en deux temps.
Dans une premier temps, il s’agit de répondre à la question : « Que peut-on dire de ce texte ? », avec en arrière plan ce qu’on a déjà revu ou appris : combien de paragraphes ? Combien de phrases ? Quel est le temps général du texte, ou y a-t-il plusieurs temps ? Recherche des verbes (qui sont conjugués oralement), des sujets, des noms, des adjectifs, etc…Rien de tout cela n’est noté. Il ne s’agit que de maintenir quelques notions en mémoire, quelques interrogations en éveil…
En revanche, dans un second temps, une ou deux difficultés soulevées par la dictée vont donner lieu à de l’écrit, brièvement. Il s’agit le plus souvent d’accords ou de conjugaison. L’entrée que je choisis presque systématiquement est celle de la transformation : on prend une phrase de texte, on se pose la question des accords ou des terminaisons, et l’on réfléchit à ce qui se passe si l’on change le genre ou le nombre d’un déterminant, un pronom de conjugaison ou le temps… Puis on note quelques exemples analogues proposés par les enfants. Mais cela reste « léger ».
Ces remarques vont être à l’origine de…
… la « feuille d’entraînement ». Les enfants la reçoivent le mardi matin. Elle est collée sur le cahier de français à la suite de la dictée coopérative et des remarques. Le travail qu’elle propose sera corrigé collectivement le vendredi ; il est à faire durant le temps de travail personnel, librement. La feuille comporte trois parties :
- GRAMMAIRE : le texte, dans lequel il faut repérer verbes, sujets, noms, déterminants, adjectifs…;
- ORTHOGRAPHE : un ou plusieurs exercices d’accords, avec pour supports des phrases ou des expressions du texte ;
- CONJUGAISON : le plus souvent deux exercices, toujours en reprenant les sujets/verbes du texte : l’un dans lequel il faut ré-accorder avec de nouveaux sujets proposés, l’autre concernant des changements de temps.
Mes amies de la classe sont super gentilles ; elles sont généreuses et elles ont un cœur d’or. Quand on se chamaille, ça me fait de la peine ! Mais ça ne dure jamais longtemps ! Mes amies sont sincères ; elles ne m’ont jamais menti. Mes copines, j’aimerais les voir tout le temps. Mes meilleures amies, elles ont un caractère d’ange. Mes amies, je les aimerai pour la vie ! Laura C.
GRAMMAIRE :
1. Dans le texte, souligne les verbes et les sujets ; surligne en vert tous les noms.
ORTHOGRAPHE :
2. Accorde les adjectifs :
Il est généreux. => Elle est ____________. => Elles sont ____________.
Elle est sincère. => Elles sont ____________. => Ils sont ____________.
Ils sont bons. => Il est _____. => Elle est _______. => Elles sont __________.
Il est doux. => Ils sont ______. => Elle est ________. => Elles sont __________.
Elle est patiente. => Il est __________. => Ils sont ____________.
3. Réécris les phrases ; attention aux transformations :
Mes amies sont généreuses et elles ont un cœur d’or.
ð Mon amie _______________________________________________________
ð Mon ami ________________________________________________________
Mes amies, je les aimerai pour la vie.
ð Mon amie, _______________________________________________________
Mes amies sont sincères, elles ne m’ont jamais menti.
ð Mon amie _______________________________________________________
ð Mes amis ________________________________________________________
CONJUGAISON :
4. Réécris la phrase en changeant le temps :
Mes amies sont super gentilles, elles sont généreuses et elles ont un cœur d’or.
IMP => Mes amies _______ super gentilles, elles ________ généreuses et elles ________ un cœur d’or.
F => Mes amies ______ super gentilles, elles _______ généreuses et elles _______ un cœur d’or.
La correction collective de cette feuille donne l’occasion de revenir une fois de plus sur nos « lois », nos intuitions, d’éventuelles explications… Le travail sur cette feuille et sa correction sont surtout prétexte à un « rabâchage » qui n’en a pas la pénible apparence, et qui rend inutiles bien des leçons à apprendre par cœur !
Recherches collectives, accumulations, « lois ». Lorsqu’il arrive que la dictée coopérative mette en évidence un problème qui se pose à tous (et qui correspond justement à une notion que je me suis proposé d’aborder dans l’année), une activité collective est lancée.
Je prends ici l’exemple d’une suite de travaux réalisés cette année sur le à. En sortant du CE2, tous les enfants connaissaient par cœur la règle traditionnelle, mais les erreurs dans les textes étaient très fréquentes, allant jusqu’à des inversions systématiques (c’était d’ailleurs le cas de la plupart des homophones grammaticaux ; voir plus haut les griefs de J.F. Inisan !). D’autre part, s’ils savaient tous donner quelques précisions sur le a (verbe avoir au présent…), il apparaissait clairement que le à n’était défini pour eux qu’en opposition avec l’autre, sans caractéristiques propres, comme « vide de sens »… Fidèle à l’idée que rapprocher « pour ne pas confondre » conduit justement à la confusion, j’ai choisi d’explorer les situations d’utilisation du à avec accent (c’est-à-dire d’en distinguer les attributs…), en refusant tout rapprochement avec le a sans accent…
J’ai donc fait remarquer aux enfants que toute la classe se trouvait face à une difficulté dont il fallait se débarrasser, et qu’il nous fallait aller au fond des choses sur ce point. Je leur ai demandé d’entamer une accumulation : j’ai donné comme modèle le morceau de phrase qui avait été corrigé ; il leur a donc fallu, dans leur cahier d’écrivain (pour que les exemples viennent « de quelque part »), relever et noter des formulations similaires, et les déposer dans une enveloppe que j’avais fixée au mur, sur laquelle était inscrit « à »… Il y a presque en permanence au mur trois ou quatre enveloppes – que l’on nomme « accumulateurs » - de ce genre, correspondant à plusieurs accumulations en cours, à plus ou moins long terme.
Quand je veux traiter une question rapidement, cette recherche est fortement encadrée ; au lieu de laisser les enfants y consacrer à leur choix quelques moments des temps de travail personnel, je les invite, par exemple en trois courtes séances rythmées par le sablier, à noter un maximum des situations demandées sur de petits bouts de papier et à les déposer dans l’enveloppe…
Je réalise ensuite une affiche, sur laquelle je note en vrac les exemples relevés dans l’« accumulateur ». Elle sert de base au travail collectif.
Ce travail collectif consiste à se poser la question d’un possible classement et d’une « loi » organisatrice. Ainsi, pour ce qui concerne les à, presque tous les cas notés sur l’affiche (on a laissé tomber les deux ou trois autres, dans un premier temps…) pouvaient être répartis en deux « familles » :
- à mon père, à ma mère, à ma copine, à mon correspondant…
- à la maison, à Paris, à la plage, à l’école, à l’hôtel, à Biarritz…
Il a donc été très facile de distinguer deux situations d’utilisation du à, « à quelqu’un » et « quelque part »… Dans le cahier de français, côté travail coopératif, on a noté une dizaine d’exemples répartis en deux colonnes, puis selon la présentation habituelle, on a mis en valeur la « loi » découverte, c’est à dire en milieu de page, encadré en rouge, avec tout le cadre colorié en jaune :
à quelqu’un…
Ex : à maman
Quelque part => à
Ex : à ma maison
C’est une présentation que Jean-François Denis avait communiquée lors d’une réunion de groupe, et que j’ai adoptée : de cette façon, on compense l’absence d’un véritable classeur de français indépendant par des petits « pavés » facilement repérables dans le cahier… Mais bien sûr, ils ne sont pas ainsi logiquement classés, tout au moins dans ma classe…
Afin d’avoir une référence marquée affectivement et aisément repérable dans les travaux futurs (surtout les dictées coopératives, mais aussi l’écriture personnelle), un « exemple-type » est affiché, avec le nom de son auteur. On pourra donc dire à l’avenir :
« à ma marraine, ça s’écrit avec un accent, comme dans à maman dans le texte de… »
Telle quelle, la « loi » ainsi dégagée n’était certes pas définitive : on y est revenu par trois fois, afin de la compléter, de l’affiner, à l’occasion de nouvelles situations rencontrées. Trois nouvelles entrées ont donc été ajoutées, sans épuiser le sujet :
- à = « pour » : une machine à laver => une machine pour laver le linge ;
- à = « avec » : des patins à roulettes => des patins avec des roulettes ;
- à = « quand ? » : à neuf heures, à midi, etc…
D’une manière générale, tous les travaux de « systématisation » (?) suivent plus ou moins ce schéma…
Comment ces nouvelles connaissances sont-elles fixées ? De deux manières :
- Pour tous, en incorporant à la « feuille devoirs/leçons » hebdomadaire un ou plusieurs exercices « maison », surtout basés sur des transformations, et en insistant sur la nouvelle référence lors des dictées coopératives ultérieures, à chaque fois que l’occasion se représentera (le « C’est comme… » devra alors être systématiquement assorti d’un rappel de la « loi »).
- Pour chacun, selon les erreurs encore commises, en faisant porter le travail sur les fichiers sur des « lois » récemment mises au point…
Se pose ici, bien sûr, la question de l’évaluation… Il me semble que l’orthographe demeure le domaine qui résiste le plus à toute tentative rationnelle de faire le point sur les acquis, tout au moins lorsqu’on se trouve, comme ici, en situation naturelle d’écriture. La seule voie possible est alors, probablement, l’observation attentive des premiers jets des textes ultérieurs…
Qu’apprendre par cœur ? Les lois ne sont jamais à apprendre… Les rappeler souvent, les faire fonctionner dans des exercices créés au plus près des besoins (intégrés à la feuille « Devoirs/leçons » hebdomadaire) me paraît plus profitable. En revanche, les conjugaisons font l’objet d’un apprentissage systématique, tout au moins dans un ordre né des rencontres dans les dictées coopératives. Elles alternent par quinzaines avec les tables de multiplications, et donnent lieu à des contrôles…
La feuille « Devoirs/leçons » est donnée aux enfants chaque lundi ; le travail qu’elle contient est à réaliser pour le vendredi et j’ai demandé aux parents (qui ont apprécié la souplesse de ce système), d’insister pour que celui-ci soit étalé dans la semaine. Cette feuille contient des directives pour compléter une fiche de lecture en rapport avec le thème du texte élu de la semaine, le texte de la dictée coopérative à préparer pour la dictée de contrôle, les conjugaisons ou les tables à apprendre par cœur, et divers exercices en français (évidemment connectés à la dictée) ou en mathématique…
La question du réinvestissement. Pendant longtemps, je n’ai pas disposé d’« interface » permettant à la fois de mesurer le réinvestissement dans l’écriture quotidienne des notions supposées acquises en travail collectif et de pousser les enfants à développer leur attention sur lesdites notions… L’idée est venue de Marcel Thorel dans sa proposition de « grilles de vigilances ».
Depuis la rentrée 2002, chaque enfant dispose, dans le protège-document contenant également la liste d’orthographe, d’une feuille sur laquelle figurent deux grilles (une pour les textes libres et une autre pour les lettres personnelles aux correspondants) et une liste numérotée(vide au départ) de point sur lesquels devront porter l’attention et la relecture à chaque production d’écrit.
La liste des vigilances est complétée tout au long de l’année. Le premier jour, elle a été ouverte par la simple consigne de toujours passer deux lignes. Puis se sont ajoutés progressivement d’autres points, tels que « mettre les majuscules », « les –s ou –x du pluriel », « l’accent du à », « -nt au pluriel des verbes », « le é du participe-passé », etc… Actuellement (janvier), la liste comporte sept points. A chaque fois que je mets en place une correction, je remplis la grille avec un code de couleurs (vert / bleu). J’invite souvent un enfant qui m’apporte un texte à le relire en se référant à sa grille de vigilances. Il est évidemment bien trop tôt pour tirer des conclusion de cette expérience…
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LISTE DES VIGILANCES :
1 : __________________________________________________________
2 : __________________________________________________________
3 : __________________________________________________________
4 : __________________________________________________________
5 : __________________________________________________________
Questionnements, perspectives…
Il est probablement apparu, à la lecture de ces lignes, qu’un certain nombre d’interrogations ont surgi au cours de ma pratique quotidienne cette année… Interrogations de plusieurs ordres…
Premièrement se pose la question de la proximité entre le travail collectif proposé à partir des dictées coopératives et ce que je peux observer, en termes de fréquence d’erreurs, en préparant les corrections des textes libres. Il apparaît en effet assez souvent que le travail lourd, organisé, planifié, presque rituel de la semaine de français m’amène à laisser de côté des besoins qui s’imposent pourtant de manière évidente à la lecture quotidienne des textes libres… Et il s’agit parfois d’un décalage très important. Cette constatation devrait logiquement me diriger vers l’approche d’un travail collectif davantage centré sur une « statistique » (même subjective) des erreurs… Mais je ne pense pas adopter cette solution : ne risquerait-elle pas de me faire « retomber » dans des apports trop extérieurs, traditionnels, avec un sens trop peu perceptible par les enfants ?
Deuxièmement, je n’ai aucune réponse convaincante quant au travail sur le vocabulaire. Les « chasses aux mots » que je pratiquais encore au début de cette année, si sympathiques et si symboliquement rattachées à Freinet lui-même, ne me semblent guère productives, au moins dans ma pratique, qui est peut-être erronée… Je me cantonne donc actuellement à des recherches visant à élargir les champs qui donnent habituellement lieu à trop de répétitions de termes imprécis, à des « fourre-tout » comme faire, dire, etc…, avec l’idée que les enfants accroissent leur champs lexical à d’autres moments (conférences, actualité, etc…).
Troisièmement, et c’est sans doute l’interrogation la plus importante, faut-il persister à faire porter le travail collectif sur des textes d’expression ? J’entrevois une autre possibilité, à trois entrées, que je vais sûrement « creuser » :
- mener d’une part le travail global d’orthographe, grammaire, conjugaison sur la base d’un texte écrit collectivement chaque semaine, comme le fait par exemple Michel Barrios sous le terme de « texte à tout faire », ou même de simples phrases relevées ça et là dans les écrits d’enfants et qui posent des problèmes ;
- réserver un petit temps à apporter des réponses aux problèmes qui se posent à tous, toujours sur le registre orthographe-grammaire-conjugaison, dans les textes libres à un moment donné ;
- réintroduire un travail sur les textes, d’un point de vue formel, en vue de leur amélioration, non pas par le biais de mises au point collectives, mais en fonction des remarques faites au cours des présentations, ce qui implique la mise au point d’une « grille de lecture » des nouveaux textes.
Mais cette façon de faire ne risque-t-elle pas de faire perdre la perception d’un français très global tout entier au service des textes ?
Surtout, mon interrogation constante concerne la simplification et le gain de temps : détecter tout ce qui est redondant, dégager des espaces pour multiplier les productions, faire sentir des liens toujours plus forts et évidents…
Liste d’interrogations nullement limitative !